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"Reagan fut le boucher de mon peuple"

Interview : Miguel D'Escoto, ancien ministre du Nicaragua 

Democracy Now, 8 juin, 2004
www.globalresearch.ca    June 2004

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Le p�re Miguel D'Escoto est un pr�tre catholique de Managua, Nicaragua. Il fut ministre des Affaires �trang�res du gouvernement sandiniste dans les ann�es 80.

http://www.democracynow.org/article.pl?sid=04/06/08/1453219

PERE MIGUEL D'ESCOTO: Avant tout, permettez-moi de dire, bien sur, que Reagan est maintenant mort, et en ce qui me concerne, j'aimerais n'avoir que de bonnes choses � dire sur lui. Je ne suis pas insensible aux sentiments de nombreux �tats-uniens qui pleurent le pr�sident Reagan., mais tandis que je prie que Dieu, dans sa bont� infinie, lui pardonne d'avoir �t� le boucher de mon peuple, pour avoir �t� le responsable de la mort de quelques 50.000 Nicaraguayens, nous ne pouvons pas, nous ne devons pas oublier les crimes commis au nom de ce qu'il a os� qualifier de libert� et d�mocratie.

Peut-�tre plus que tout autre pr�sident US, Reagan a convaincu de nombreuses personnes � travers le monde que les Etats-Unis �taient une tromperie, un gros mensonge. Non seulement ce pays n'est pas d�mocratique, mais en fait c'est le plus grand ennemi du droit � l'auto-d�termination des peuples. Reagan �tait connu comme le "grand communicateur", et je pense que c'est vrai si on croit qu'�tre un communicateur signifie �tre un grand menteur. Ce qu'il �tait sans aucun doute. Il pouvait prof�rer les plus grands mensonges sans sourciller. A l'entendre affirmer que nous �tions soi-disant en train de pers�cuter les Juifs et que nous faisions br�ler des synagogues qui n'existaient m�me pas, j'ai fini par croire que Reagan �tait poss�d� par des d�mons. Franchement, je crois r�ellement que Reagan � l'�poque, tout comme Bush aujourd'hui, �tait poss�d� par le d�mon du destin manifeste.

Bien entendu, en disant cela je suis conscient que les gens du "Projet Pour Un Nouveau Si�cle Am�ricain", par exemple, consid�rent pour leur part que sa mort constitue une grande perte.

A cause de Reagan, et de son h�ritier spirituel George W. Bush, le monde aujourd'hui est bien plus dangereux qu'il ne l'a jamais �t�. En fait, Reagan �tait un hors-la-loi international. Il acc�da � la pr�sidence peu de temps apr�s que Somoza, le dictateur impos� par les Etats-Unis au Nicaragua pendant pr�s d'un demi-si�cle, ait �t� renvers� par des nationalistes nicaraguayens men�s par le Front de Lib�ration Sandiniste. Pour Reagan, le Nicaragua devait �tre reconquis.

Il reprochait � Carter d'avoir perdu le Nicaragua, comme si le Nicaragua appartenait � quelqu'un d'autre qu'au peuple Nicaraguayen. Et ce fut la d�but de cette guerre invent�e par Reagan, la guerre des Contras, au sujet de laquelle il n'a pas arr�t� de mentir au peuple, rendant le peuple �tats-unien un des peuples les plus ignorants de la terre. J'ai dit ignorant, pas b�te. Mais le peuple le plus ignorant de la terre sur la politique �trang�re des Etats-Unis. Les gens n'ont aucune id�e... s'ils avaient la moindre id�e, ils se r�volteraient.

Ainsi, il a menti au peuple, comme Bush ment au peuple, menant leur politique comme si les Etats-Unis �taient au-dessus de toutes les lois, humaines ou divines. Alors nous avons tra�n� les Etats-Unis, les Etats-Unis de Reagan, devant la Cour Internationale. J'�tais ministre des affaires �trang�res du Nicaragua � l'�poque. Et le gouvernement des Etats-Unis re�ut la condamnation la plus s�v�re jamais prononc�e dans l'histoire de la Justice internationale. Les Etats-Unis, depuis le d�but des ann�es 20, proclamaient au monde entier qu'une des preuves de leur sup�riorit� morale �tait justement leur respect des lois internationales et leur respect des d�cisions de la Cour Internationale. Le Nicaragua les a train� devant la Cour Internationale et les Etats-Unis ont �t� condamn�s � une peine que les Etats-Unis refusent toujours de payer. Ils doivent � pr�sent au Nicaragua entre 20 et 30 milliards de dollars... Les d�g�ts provoqu�s au Nicaragua par la guerre de Reagan � l'�poque o� nous avons quitt� le pouvoir �tait de plus de 17 milliards de dollars, et �a c'�tait selon les estimations tr�s mod�r�es, des gens de la commission �conomique sur l'Am�rique latine des nations unies, de l'universit� de Howard et d'Oxford, de l'universit� de Paris, qui composaient pour l'essentiel l'�quipe charg�e d'effectuer l'estimation. Les Etats-Unis re�urent l'ordre de payer pour les d�g�ts provoqu�s. Bush n'a jamais accept� de me parler sur ce sujet. J'ai dit "alors rencontrons nous pour que vous puissiez ex�cuter la sentence de la Cour." Il m'a r�pondu par �crit � deux reprises qu'il n'y avait rien � discuter.

Alors Reagan a endommag� le Nicaragua au-del� de l'imagination de ceux qui m'entendent aujourd'hui. Les cons�quences de ces interventions meurtri�res et criminelles dans mon pays se ressentiront encore dans 50 ans ou plus.

http://www.democracynow.org/article.pl?sid=04/06/08/1453219


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