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Ce que cache l'exigence de Washington

de lever les sanctions contre l'Irak

par Sara Flounders

Workers World, May 2003.
www.globalresearch.ca   29 May 2003

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Le gouvernement US a r�clam� la lev�e compl�te et imm�diate des sanctions contre l'Irak impos�es par le Conseil de s�curit� de l'ONU.

Pendant 13 ans, le mouvement mondial contre les sanctions fit face � l'opposition totale du gouvernement US, que se soit sous les administrations r�publicaines ou d�mocrates. Pourquoi a-t-on chang� d'avis sur ce point � Washington ? Quelle position devrait prendre le mouvement mondial contre les sanctions face � la nouvelle strat�gie de Washington ? Tout d'abord, il est important de comprendre les motivations du gouvernement Bush.

Le Conseil de s�curit� de l'ONU contr�le au moins 30 milliards de dollars plac�s sur les comptes du programme " P�trole contre nourriture ", qui furent accumul�s gr�ce � la vente de p�trole irakien durant le r�gime des sanctions. Depuis qu'ils ont d�truit militairement le gouvernement [irakien], les �tats-Unis se sont arrog�s le titre de pr�cepteur de l'Irak en temps que force qui choisira le nouveau gouvernement. Cependant les sanctions emp�chent le transfert d'argent en Irak. Ainsi les �tats-Unis veulent mettre fin aux sanctions de mani�re � ce que ces milliards de dollars puissent �tre distribu�s � un gouvernement administr� par les �tats-Unis en Irak. Ils consid�rent cet argent comme une somme qui leur revient de par leur invasion criminelle et la destruction de la souverainet� irakienne.

De plus, des milliards de dollars appartenant � l'Irak furent gel�s depuis ao�t 1990 sur tous les comptes bancaires dans le monde. La fin des sanctions pourrait �tre un premier pas vers la mise � disponibilit� de cet argent � un " gouvernement irakien " contr�l� par les �tats-Unis qui le verserait ensuite aux avides compagnies US auxquelles auront �t� d�livr�s les contrats de " reconstruction " de l'Irak.

Les sanctions ont provoqu� la mort de plus d'un million et demi d'Irakiens selon les estimations de l'ONU. Devrait-on maintenant remettre au gouvernement qui causa ces victimes et qui d�truisit les villes irakiennes dans une guerre d'agression brutale, les fonds qu'il a soustrait si longtemps au peuple irakien ?

Il est fondamental de reconna�tre que les �tats-Unis ou la Grande-Bretagne n'a aucun droit sur les ressources de l'Irak. Il n'y a aucune justification pour les dizaines de milliers de troupes imp�rialistes qui occupent le pays. C'est une agression criminelle et ill�gale. A pr�sent, la campagne US pour l'arr�t des sanctions et de d�tournement des fonds irakiens au profit des occupants est de la piraterie dans sa forme la plus flagrante.

Des milliards sont en jeu

Le probl�me de la lev�e des sanctions contre l'Irak se pr�sente comme la prochaine grosse confrontation au Conseil de s�curit� de l'ONU.

La France, la Russie et la Chine ont toutes le droit de veto concernant l'arr�t des sanctions. Un certain nombre de pays au Conseil de s�curit� ont rappel� � Washington que les sanctions ne peuvent �tre lev�es tant que les inspecteurs en armement de l'ONU n'ont pas confirm� l'absence d'armes de destruction massive. C'est un moyen diplomatique de renvoyer � Washington l'excuse frauduleuse dont le gouvernement US se servit pour maintenir les sanctions pendant 13 ans.

La France a provoqu� �galement la col�re de l'administration Bush en proposant que les sanctions civiles pourraient �tre " suspendues " pour des raisons humanitaires. De par le fait d'annoncer qu'elle n'�tait pas pour la " lev�e " des sanctions, la France a rappel� � Washington que le tissu de sanctions que les �tats-Unis ont tiss� fournit au Conseil de s�curit� le contr�le des revenus p�troliers futurs de l'Irak. C'est �galement la point de vue de la Russie.

Le porte-parole de la Maison Blanche Ari Fleischer rejeta ces interpr�tations en annon�ant cat�goriquement " Les sanctions doivent �tre lev�es et pas simplement suspendues. ... Le r�gime disparu, les �tats-Unis sont d'avis que les sanctions �conomiques ne sont plus n�cessaires. "

Aussi longtemps que les sanctions sont maintenues officiellement, les revenus de la vente de p�trole irakien continueront � �tre d�pos� sur les comptes de l'ONU. Des milliards de dollars sont en jeu pour les prochains contrats. Les pays pr�sents au Conseil de s�curit� qui avaient partag� l'opinion de Washington concernant les sanctions ne sont maintenant pas si press�s de livrer ces fonds accumul�s, la mise pour tous les contrats de reconstruction et l'avenir des revenus du p�trole aux mains des conqu�rants.

�videmment, la France serait bien heureuse de pouvoir n�gocier un accord discret avec l'imp�rialisme US pour une part de ces fonds expropri�s et les contrats futurs. La France, on le sait, est �galement une puissance imp�rialiste qui a des int�r�ts financiers globaux reposant sur le pillage des ressources des pays en voie de d�veloppement qui faisaient partie de son empire colonial. La France a �galement des troupes dans plusieurs pays d'Afrique.

C'est une des raisons pour laquelle Washington ne veut pas que l'ONU soit impliqu�e d'une quelconque mani�re en Irak. Les �tats-Unis ne veulent pas de demandes financi�res autres que leur vol unilat�ral.

La Syrie, un membre tournant du Conseil de s�curit�, souligna que la lev�e des sanctions " l�gitimerait l'invasion am�ricano-britannique ". Elle fournirait aux �tats-Unis " le droit de contr�ler le p�trole irakien et d'installer le gouvernement qu'ils pr�f�rent ".

Pendant ce temps, l'administration Bush se presse d'installer un tel gouvernement. Elle aurait pr�vu la mise sous contr�le quotidienne de l'industrie p�troli�re irakienne � des Irakiens qu'elle aura nomm�s. Ils seront sous l'administration " civile " de g�n�ral US retrait� Jay Garner. Un ancien PDG de la compagnie p�troli�re Shell, Philipp J. Carroll, dirigera un conseil pour l'industrie p�troli�re irakienne. C'est bien s�r dans ce conseil que les v�ritables d�cisions seront prises.

Jusqu'� ce que soit clarifi�e la question du statut l�gal du p�trole irakien, il sera difficile pour les �tats-Unis de vendre ce p�trole sur le march� mondial. Avant la guerre de 1991, les revenus de la vente de p�trole irakien d�passaient les 20 milliards de dollars par an.

Chronologie des sanctions de l'ONU

Il est int�ressant de passer en revue l'histoire des sanctions US/ONU impos�es � l'Irak, leur impact et ce qui est en jeu dans ce d�bat.

En ao�t 1999, utilisant sa puissance dominante, Washington �non�a et imposa les sanctions �conomiques au Conseil de s�curit� de l'ONU qui ont �touff� l'Irak durant les 13 derni�res ann�es. Les sanctions �taient d�finies comme une mesure prise pour forcer l'Irak � se retirer du Kowe�t.

Il est utile de rappeler que le 25 juillet, avant l'invasion du Kowe�t, l'ambassadrice US, April Glaspie, avait rencontr� le dirigeant irakien Saddam Hussein. Il l'informa que l'Irak prendrait des mesures contre le Kowe�t si les n�gociations �chouaient. Le riche �mirat maintenait le prix du p�trole bas et puisait le p�trole irakien souterrain gr�ce � des puits inclin�s. L'Irak �tait dans une situation financi�re mis�rable de par sa guerre avec l'Iran.

Glaspie r�pliqua que Washington n'avait " pas d'opinion " sur le conflit irakien avec le Kowe�t.

Lorsque l'Irak entra au Kowe�t cependant, les �tats-Unis r�clam�rent et obtinrent du Conseil de s�curit� la forme la plus extr�me de punition collective jamais impos�e � un peuple tout entier.

L'Irak ne pouvait plus vendre du tout son p�trole ni tout autre bien. Il ne pouvait rien importer. Toutes ses ressources en banques en dehors de l'Irak - des milliards de dollars provenant de la vente de p�trole - furent gel�es. Avec ses fonds gel�s, sans aucun commerce, ni cr�dits ou pr�ts, l'�conomie tout enti�re s'�croula. L'inflation grimpa sans pouvoir �tre contr�l�e.

Lorsque le Pentagone commen�a � bombarder en janvier 1991, ses objectifs �taient choisi pour intensifier l'impact meurtrier des sanctions. Les �tats-Unis d�truisirent consciemment les installations d'eau, sanitaires, d'�vacuation des eaux usag�es et de pompage ainsi que les usines d'alimentation, pharmaceutiques et installations m�dicales. Des �pid�mies de chol�ra, de typho�de et de rougeole se r�pandirent. Dans l'espace de quelques mois, des dizaines de milliers d'enfants irakiens moururent de par l'eau pollu�e et non trait�e.

A la fin de la campagne massive de bombardement de 40 jours, l'Irak se retira du Kowe�t. Ceci aurait d� mettre fin � la raison d'�tre des sanctions. Cependant, comme condition de cessez-le-feu, les �tats-Unis r�clam�rent que les sanctions demeurent jusqu'� ce que le Conseil de s�curit� de l'ONU ait confirm� que l'Irak a d�truit toute arme non conventionnelle dont il disposerait.

Ceci devint l'excuse pour une longue lutte dans le but d'obtenir le droit d'envoyer des milliers d'inspecteurs en Irak pour confirmer que l'Irak n'avait pas de telles armes. Des industries enti�res et n�cessaires � tout pays industrialis� moderne furent d�truites, y compris des usines chimiques et celles produisant des engrais et des pesticides. Malgr� plus de 9.000 inspections, la menace continue d'un veto US laissa en place ces sanctions meurtri�res pendant 13 ans.

La campagne contre les sanctions

Depuis sa cr�ation en 1991, l'International Action Center mena une campagne pour mettre fin aux sanctions contre l'Irak. L'ancien Ministre de la Justice am�ricain, Ramsey Clark, le fondateur de l'IAC, dans un effort d'attirer l'attention mondiale sur l'impact des sanctions, fit le difficile voyage en Irak chaque ann�e en compagnie de d�l�gations recueillant des informations. Il lan�a un appel international pour l'arr�t des sanctions contre l'Irak qui fut sign� par plusieurs dirigeants mondiaux ainsi que par des groupes internationaux des droits de l'homme et des organisations pacifiques.

L'appel caract�rise les sanctions comme une arme de g�nocide et un " crime contre l'Humanit� ", comme d�fini par les principes de Nuremberg. L'appel fut traduit dans de nombreuses langues et devint la base d'une s�rie de conf�rences internationales � Londres, Rome, Ath�nes, Madrid, Tokyo, New York et San Francisco.

En 1995, un rapport de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture confirma que 567.000 enfants de moins de cinq ans �taient morts directement de par la poursuite des sanctions de l'ONU. Une mobilisation globale grandissante r�clamant la lev�e des sanctions, cr�a un changement radical dans l'opinion publique mondiale.

Alors que l'opposition mondiale augmentait, les �tats-Unis modifi�rent leur campagne de presse. Essayant de donner un aspect humanitaire � leur politique brutale, ils instaur�rent le programme " P�trole contre nourriture ". Ce programme permettait � l'Irak de vendre un certain quota de son p�trole et d'acheter de la nourriture et des m�dicaments de par ces revenus. Le Conseil de s�curit� de l'ONU, sous un comit� sp�cial d�nomm� comit� 661, contr�le tous les revenus et diss�que chaque contrat de vivres que l'Irak doit recevoir.

En plus de ces ventes de p�trole s�v�rement restreintes, l'Irak d�t payer des r�parations au Kowe�t ainsi qu'un suppl�ment d'autres exigences d�coulant des destructions et bombardements US dans la guerre de 1991. � partir de janvier 1997, lorsque ce programme d�marra, jusqu'� la fin de 2001, l'Irak vendit environ 50 milliards de dollars en p�trole. Tout cet argent fut d�pos� sur un compte contr�l� par l'ONU. L'Irak re�u moins de 25 pour cent de cette somme pour l'achat de nourriture et de m�dicaments, ce qui revient � moins de 22 cents par jour et par personne.

Environ 34 pour cent des revenus irakiens du programme all�rent aux monarques kowe�tiens et autres " victimes " de la guerre de 1991. ExxonMobil re�u 200 millions de dollars en " r�parations de guerre " des fonds " P�trole contre nourriture ", qui �taient sens�s nourrir les enfants irakiens affam�s. Des milliards de dollars all�rent �galement � l'ONU pour l'administration de ce programme. Une bureaucratie de plusieurs milliards de dollars fut cr�e pour garantir des contrats lucratifs avec de nombreux pays.

Pendant les six derni�res ann�es, les repr�sentants am�ricains et britanniques au comit� 661, retard�rent ou emp�ch�rent la plupart des contrats soumis par l'Irak. Sous la pression des �tats-Unis, le comit� refusa plus de 90 pour cent des contrats irakiens destin�s � des projets de r�fection des canalisations et du traitement de l'eau ainsi que d'irrigation.

De par ce blocage continu, des milliards de dollars de la vente de p�trole ne furent jamais lib�r�s pour les besoins d�sesp�r�s irakiens mais furent retenus sur des comptes de l'ONU. Ces fonds, ainsi que les revenus du p�trole � venir, constituent ce que les firmes US veulent contr�ler sans partage.

Le mouvement mondial pour l'arr�t des sanctions contre l'Irak est principalement un mouvement de lutte pour le droit du peuple irakien � disposer de ses propres ressources. Les sanctions furent un crime contre l'humanit� et une attaque contre la souverainet� nationale de tout pays en voie de d�veloppement. Elles doivent dispara�tre.

Cependant les occupants US en Irak ne doivent pas obtenir l'autorisation de continuer leur pillage imp�rialiste sous une autre forme. Le mouvement anti-guerre et contre les sanctions doit exiger le d�part des troupes US ainsi que les repr�sentants qu'ils ont dispos�s. Il doit d�fendre le droit du peuple irakien de contr�ler ses propres ressources. Pas un centime du p�trole irakien ne doit aller au r�gime criminel d'occupation US.

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Sara Flounders est coordinatrice de Iraq Sanctions Challenge et codirectrice de l'International Action Center. Paru dans l'�dition du 8 mai 2003 de " Workers World newspaper "Texte original (en anglais) : http://www.workers.org/ww/2003/sanctions0508.php  Copyright Workers World 2003.  For fair use only/ pour usage �quitable seulement .


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